L’écriture de Margaret Mazzantini a quelque chose qui me transperce. Je crois que son style – direct, raffiné et en même temps vulgaire – l’amène à être une auteure qu’on adore ou qu’on déteste. Et moi je l’adore. Comme d’habitude, je préfère vous parler des livres indélébiles dans ma mémoire et Nessuno si salva da solo (Personne ne se sauve tout seul) est l’un d’entre eux. Ce n’est pas le plus célèbre de ses romans, mais c’est justement pour ça que j’aimerais en parler ici.
Ils se sont arrêtés à côté de l’éboulement. Ils ne cessent de s’espionner, comme deux êtres surplombant un trou. Avec la peur de tomber dedans. D’où exactement est partie la faille qui a ouvert cette zone en deux ? Ils peuvent essayer de chercher dans les environs. Mais il n’y a pas de véritable épicentre. Ils se regardent en se souriant.
Un mariage qui se termine est un cercle qui doit être fermé. Dans ce roman, les sentiments des deux protagonistes voyagent sans cesse entre souvenirs doux-amers d’un temps qui n’est plus et qui transforme leur histoire en un récit universel. À travers ce dîner, le lecteur se plonge dans l’intimité d’un couple, trop faiblement armé pour la vie adulte et presque analphabète en matière de sentiments, qui a vécu ses contradictions, ses élans sincères et ses échecs comme tout le monde. Les personnages se retrouvent assis à la même table, animés par une rage encore trop vivante et une mélancolie trop solide pour être appelés Amour. Le contrepoids sera donné par un couple plus âgé et inconnu qui leur transmettra une possibilité nouvelle et différente de considérer les choses.
Personnellement, je considère la fin d’un mariage ou d’une relation amoureuse comme importante, c’est un de ces moments de la vie où on ne peut pas échapper à un acte solitaire de responsabilité envers soi-même. La solitude intérieure et tous les passages qu’elle engendre nous aideront à rationaliser la douleur et les raisons de nos échecs. Chacun, face aux défis de l’existence, doit forcément trouver le germe d’une renaissance possible dans son âme, mais comme Margaret Mazzantini nous le fait entendre, ceci n’exclut pas le partage qui passe surtout par certains actes de pitié devenus désormais si rares. Elle nous suggère, à travers les mots d’un vieil homme « capable de gestes féminins » qu’il y a, peut-être, quelque chose, au milieu de tout, qui est fait de la matière de la compassion et de l’accueil dont chacun d’entre nous ressent un puissant et légitime besoin. Nous sommes tous liés et vu que ce que nous avons à l’intérieur n’est que le reflet de l’extérieur, elle nous invite à considérer que, si l’on veut, on n’est jamais vraiment seuls même dans le cœur de la tempête. Tout cela me touche en profondeur et vous atteindra vous aussi.
MAZZANTINI, Margaret, Nessuno si salva da solo, Milano, A. Mondadori Editore, 2011, 189 p.
MAZZANTINI, Margaret, Personne ne se sauve tout seul, Robert Laffont, 2014, 228 p. (Traduit par Delphine Gachet.)
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