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La Variante de Lüneburg, de Paolo Maurensig

Par Cinzia Dezi

Parlons aujourd’hui d’un roman sorti en 1993, qui à l’époque, en Italie, fit figure de « cas » littéraire de l’année. La Variante de Lüneburg, écrit par Paolo Maurensig, est l’histoire d’une obsession pour les échecs, mais pas seulement, car, à mon avis, toute obsession implique une personnalité disposée à l’abnégation, et cela a, en général, des conséquences assez importantes.

Sur le site de l’auteur, on lit une petite confession : « Je me souviens que, quand j’étais enfant, parfois je jouais tout seul aux échecs ; je me déplaçais d’une chaise à l’autre, d’un côté à l’autre d’une petite table, en essayant de m’éloigner de ce que j’avais pensé en tant que joueur des blancs, pour ne pas influencer l’autre moi-même qui jouait avec les noirs. À la fin, je me demandais, en cas de victoire, lequel de mes deux “je” pouvait se considérer comme vainqueur. Heureusement tous les matchs se terminaient sur un score nul[1] ».

Dans la première partie du livre, le cadavre d’un riche entrepreneur allemand est découvert. S’agit-il d’un suicide ou d’un homicide ? Pour répondre à cette question, l’auteur va se plonger dans le récit de son obsession pour les échecs, qui prend ainsi la forme de l’obsession du jeune protagoniste, Hans Mayer.

Dans la deuxième moitié du récit, un roman dans le roman s’offre aux lecteurs, comme dans un jeu de poupées russes. La voix du narrateur change : c’est le maître d’échecs Tabori qui parle maintenant à la première personne (même si l’on découvrira plus tard que sous ce faux nom se cache une autre identité). Un second virage dans le récit qui donne à ce dernier les couleurs d’un angoissant roman historique, situé pendant la Deuxième Guerre mondiale. L’affrontement épique entre deux joueurs d’échecs, l’un juif et l’autre nazi, nous parle alors du rapport entre le bourreau et sa victime, des sentiments ambivalents que cela engendre, du fait que, pour paraphraser une chanson de Fabrizio De André (notre Georges Brassens à nous), « même si nous nous en foutons ! Chacun de nous est concerné ».

On peut aussi trouver dans cette œuvre quelque ressemblance thématique avec Le Naufragé (Der Untergeher) de Thomas Bernhard, mais Paolo Maurensig n’a pas le même style, qui nous envahi comme une inondation, et peut-être ne le recherche-t-il même pas. En revanche, son style est presque tonitruant, du moins à mon goût.

Si, comme on l’espère, on vous a donné envie de lire ce roman, vous trouverez ci-dessous des références bibliographiques :

Édition italienne :

Édition française :

[1] La traduction est la mienne.

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